mardi 20 avril 2010

Afrique : LE PRIX DE LA FELONIE ET DE LA TRAITRISE

Par Serge Nicolas NZI

Peut-on faire de la politique sans trahir ses convictions et les idéaux de son propre camp ? C’est la grande question qui assaille tous les Africains qui veulent voir loin en commençant par voir ce qui est devant eux.

Dans les sociétés africaines le traître est considéré comme une personne maléfique qui est perçue comme l’incarnation du diable. En définitive, la trahison touche aujourd’hui les relations humaines dans toutes les sphères de la société : la famille, l’amitié, la relation à plus puissant que soi, au souverain et même la relation à Dieu (puisqu’il peut s’agir d’une rupture avec la foi). La trahison modifie l’équilibre du monde.

Le traître brise l’ordre moral, social et pervertit les solidarités. La trahison est souvent causée par l’envie, la soif du pouvoir, l’ambition : la volonté de s’élever au dessus de sa condition, de sortir d’un état de dépendance, de s’affranchir d’une domination. En ce sens, elle est aussi un danger pour la société, pour sa cohésion et sa stabilité.

Nous observons aujourd’hui, sur la scène politique africaine, des hommes et des femmes qui se livrent, sans vergogne, à des transhumances politiques qui les font passer d’un parti à l’autre rien que pour être dans le cercle de celui qui est au pouvoir. Quels projets de société ont-ils à nous proposer pour renforcer le bonheur commun et le vivre ensemble ?

Leurs comportements nous font dire ici que la psychologie humaine est un champ de travail très vaste et que toutes les sensibilités méritent le même intérêt, si nous voulons trouver des explications cohérentes à la relation que chaque peuple entretient avec son univers mental et social. Nous voulons jeter un regard sur la traîtrise dans la vie humaine et en politique surtout, car c’est un domaine de la vie qui engage la vie et le futur des millions de personnes.

Cette démarche nous conduit, immédiatement, à des questionnements auxquels nous ne sommes pas certains d’avoir les réponses.

- Comment un homme normal, qui a été élu pour veiller au bien-être des habitants de son pays, peut-il signer un contrat complètement défavorable à son pays ?

- Comment peut-on être un chef d’État non pas au service de son pays, mais pour préserver les intérêts d’une tierce puissance dans le pays qu’on dirige ?

Le chef de l’État, agent étranger dans son propre pays, est la réalité la plus humiliante et la plus indigne des 50 ans d’indépendance des pays africains.

Nous sommes même arrivés à des situations invraisemblables en Afrique où des gouvernements ont accepté de réaliser des projets grandioses non pas dans l’intérêt du pays, mais pour les commissions financières juteuses qui seront empochées par les uns et les autres.

Le cas des surfacturations des complexes sucriers en Côte d’Ivoire dans les années 1970 reste un cas d’école dans lequel les complexes achetés par des pays voisins à 5 milliards de Francs CFA, ont été vendus à ce pays à 11 milliards de Francs CFA, et en bonus les auteurs de la surfacturation n’ont jamais été poursuivis en justice.

Dans un pays, lorsque le président élu par la majorité de ses concitoyens, s’appuie sur son groupe ethnique pour gouverner, tous ceux qui ne sont pas du bon groupe ethnique se sentent trahis.

Dans un tel système, la plupart des entreprises d’État et tous les ministères importants de souveraineté sont occupés par les membres de l’ethnie présidentielle, laissant aux autres, la condition féminine, la petite enfance, les sports et loisirs, la francophonie, le tourisme et l’artisanat.

Dans un tel système la promotion économique, sociale et professionnelle de ceux qui ne sont pas de l’ethnie au pouvoir est, parfois, durablement bloquée par l’arbitraire de ce système inique qui régit la vie des institutions et de l’État.

Il s’ensuit un sentiment de trahison, une frustration, une tristesse, une grande amertume et un ressentiment qui finit par gangrener le corps social de la nation et par conduire le pays à des violences incontrôlables.

Le Togo de EYADEMA avec les Kabyés, le Zaïre de MOBUTU avec les Ngbandis, la Côte d’Ivoire d’HOUPHOUËT-BOIGNY avec les Baoulés aux premiers rangs ainsi que le Rwanda d’HABYRIMANA avec les Hutus, illustrent parfaitement cette vision rétrograde de l’exercice du pouvoir politique au service d’un groupe contre le reste de la nation.

Nous vivons dans un monde d’impostures, un monde obscur et incertain que l’on dit entre chien et loup où la facilité, la médiocrité, la lâcheté, la corruption, la compromission, la forfaiture et la méchanceté gratuite ont pris de l’avance sur la raison, le bon sens, la justice, la paix. La simple fraternité humaine et le courage de vivre ensemble dans un monde qui nous appartient tous, sont devenus des rêves inaccessibles à notre génération.

Dans les temps anciens, on coupait la langue du menteur, on coupait la main du voleur et on pendait le faux témoin ou le lâche, car le lâche c’est celui qui renie sa propre parole et qui manque à son devoir d’homme. Être lâche, c’est manquer de courage mais aussi installer durablement le faux dans la vie commune.

Notre frère, le capitaine para-commando Isidore Noël Thomas SANKARA, fut trahi et tué par ceux qui prétendaient être ses amis, ses compagnons d’une révolution démocratique et populaire, ayant pour but la libération de leur pays de l’assujettissement au capital étranger. C’est aussi cela le visage de la félonie en politique.

Les contrats, dans les temps anciens, étaient conclus sur la base de la parole donnée. Observons simplement aujourd’hui l’engorgement des tribunaux pour les cas de contestation de signatures sur des documents écrits pour nous rendre compte que la modernité est parfois un immense recul dans la communauté des hommes. Pourquoi trahir est devenu, aujourd’hui, une seconde nature chez les êtres humains ?

Il est même arrivé des situations incroyables où la religion trahit son propre message. Le silence coupable de l’église catholique face au sort des Juifs pendant la guerre est sous nos yeux.

Les États unis n’ont-ils pas soutenu et permis aux Khmers rouges du Kampuchéa de siéger à l’ONU ?

Les USA, n’ont-ils pas vendu des armes à l’Iran qui était sous embargo international à la demande américaine ? La France, qui prétend être la patrie des droits de l’homme, n’a-t-elle pas formé, équipé et entraîné l’armée mono ethnique hutue, auteur du génocide rwandais ? Comme vous le constatez un pays peut trahir ses propres convictions et violer sa propre morale.

La vie sur terre nous donne souvent l’occasion de voir, de nos yeux, le mal ; cela nous fait apprécier le bien. La stupidité nous fait apprécier l’intelligence dans l’être humain. La félonie nous fait apprécier la sincérité des hommes et des nations. Les Africains ont, pour cela, beaucoup de considération pour les pays qui savent honorer la parole donnée.

C’est pourquoi nous voyons la nuit pour mieux apprécier le jour, le silence pour que la parole ait un sens, la maladie pour que la santé ait un sens, la guerre pour que la paix ait un sens, la mort pour mieux apprécier la vie et nous remercions tous Dieu de nous avoir donné la fatigue et les peines pour que le repos et la joie aient un sens.

La félonie est un acte de trahison d’un sujet envers son souverain ; dans le droit moderne, on peut l’assimiler à la haute trahison ou au crime contre l’intérêt national. C’est aussi l’image de l’infidélité, de la déloyauté et de la forfaiture. Accepter l’argent de l’étranger et prendre les armes contre son propre peuple est un acte indigne qui fait de vous un traître et un félon.

Exemple : La rébellion katangaise de Moïse TSHOMBÉ qui avait reçu l’argent et le soutien des Occidentaux pour déclencher le 11 juillet 1960, la sécession katangaise qui a affaibli le Congo et le gouvernement de Patrice LUMUMBA pour permettre l’arrivée d’un certain Joseph Désiré MOBUTU au pouvoir était une félonie et une forfaiture dont le Congo ne s’est pas encore remis jusqu’aujourd’hui.

Autres exemples : Pendant les années de plomb de l’apartheid, il y avait des Noirs qui, en échange d’un peu d’argent, collaboraient avec la police blanche raciste et criminelle pour dénoncer les nationalistes noirs et indiquer les lieux de réunions de ceux qui luttaient pour une société libre et juste pour tous. Comment un homme normal peut-il trahir sa propre cause et son propre avenir ? C’étaient des cas de trahisons et de forfaiture qui nous sidèrent et nous donnent froid dans le dos aujourd’hui encore.

Les 6000 Iraniens, rémunérés par la CIA, qui marchèrent le 19 août 1953 devant le Parlement Iranien pour exiger la démission du Premier ministre iranien le Dr MOSSADEGH, étaient des traîtres, des félons qui travaillaient sans le savoir contre les intérêts pétroliers de leur propre pays. Car, en échange, le pays a eu droit à la dictature du SHAH, qui a favorisé l’avènement de l’ayatollah KHOMEINY et l’institutionnalisation de l’intégrisme islamique en Iran de 1979 à ce jour.

Les rebelles ivoiriens qui, en complicité avec la France, ont déclenché une guerre absurde, pour tuer des innocents, violer et éventrer des femmes, piller les maisons et les ressources du pays, jeter des milliers de personnes sur les routes dans le seul but d’obtenir le départ de Laurent GBAGBO du pouvoir, ont posé un acte de forfaiture digne d’une félonie contre leur propre peuple.

Il va falloir, un jour, faire le bilan de cette rébellion pour se rendre compte qu’au final la partition de la Côte d’Ivoire a profité à ses voisins par le détournement des ressources du pays. Que cela a aussi affaibli la capacité de production de la Côte d’Ivoire pour, finalement, voir les rebelles siéger au gouvernement avec Laurent GBAGBO.

Même ceux qui ne sont pas des tifosi de GBAGBO Laurent reconnaissent, aujourd’hui, que les moyens qui ont été utilisés contre lui et son pays relèvent pitoyablement du brigandage et du gangstérisme.

L’histoire humaine est aussi une science dans laquelle rien n’est écrit à l’avance : Moïse TSHOMBÉ ne savait pas qu’il allait finir sa vie dans une prison en Algérie, MOBUTU ne savait pas qu’il allait être chassé du Zaïre pour aller mourir à l’étranger, Ahmadou AHIDJO n’imaginait pas mourir en exil et être enterré au Sénégal en dehors de son Cameroun natal.

Le président de l’UNITA, Jonas MALHEIRO SAVIMBI n’imaginait pas que la reconstruction de l’Angola allait se faire sans lui. HOUPHOUËT-BOIGNY n’imaginait pas, une seule seconde, que la France allait un jour, en complicité avec des pays voisins, favoriser la partition de la Côte d’Ivoire. Tous ces gens ont vu leurs certitudes vaciller sous leurs pieds avant de mourir. La félonie a toujours un prix. On ne trahit jamais sans conséquence, c’est une simple leçon de la vie humaine.

Le règne du dieu argent

Notre premier sentiment, en observant toutes les trahisons qui jalonnent notre vie nationale depuis les indépendances de nos pays africains, est une immense honte. La honte de nous rendre compte que le félon, le traître et les faussaires sont les propres fils de nos pays, qui vont s’allier à l’étranger pour trahir l’intérêt commun, celui de la nation.

La société africaine est aujourd’hui pervertie, le fils renie le père, la mère renie sa fille, la femme trompe son mari, le mari trahi abandonne femme et enfants pour refaire sa vie avec une femme plus jeune que sa propre fille.

Nous faisons tous le constat douloureux d’une société en perdition où les dirigeants politiques détournent l’argent public pour leurs petits intérêts égoïstes et mesquins.

Comment la bassesse, la fourberie, la félonie, la lâcheté, la perfidie, la duperie, la trahison et la forfaiture, ont-elles pu s’incruster aussi durablement dans cette société africaine qui, hier encore, avait réussi à survivre aux calamités de l’histoire (colonialisme, travaux forcés, impôts de capitation et humiliations diverses) grâce à sa force morale reposant sur le respect de l’autre par la parole donnée, le respect du bien public et le bouclier de la solidarité familiale ? Comment avons-nous tourné si facilement le dos à l’intelligence pour nous embourber aussi profondément dans la médiocrité ?

L’argent roi, l’argent devenu maître, a étouffé les énergies, dicté les extravagances et les faiblesses de notre société en ouvrant les portes à toutes les indécences et à tous les abus. L’argent, à tout prix, a mis en danger la culture authentique de nos peuples africains.

Cela débouche sur de moins en moins de liberté, moins de respect des uns envers les autres et met la famille déboussolée en hypothèque.

Verrès et Catilina surgissent de partout et il n’est même plus de Cicéron pour dénoncer les scandales qui s’accumulent. Néron plus arrogant que jamais s’est installé, ce qui annonce l’heure des martyrs…

Comme Caïn nous nous sommes retrouvés assassins de nos propres valeurs. Abel disparu, nous ne pouvons plus dormir.

L’œil est allumé dans notre nuit de honte et a conduit beaucoup d’entre nous à prendre le chemin difficile et douloureux de l’exil à l’étranger.

Telle est l’analyse que nous faisons de la situation de nos pays africains et de nos populations en ces heures difficiles où il est plus qu’urgent de reconstruire la confiance depuis la cellule familiale jusqu’au sommet de l’État.

Le prix de la félonie et de la traîtrise

La félonie est le contraire du courage, c’est une forfaiture. Pour clore ce chapitre nous voulons rapporter à tous ceux qui trahissent les masses africaines dans leur quête de liberté, de bonheur et de justice sociale. Nous leur faisons simplement don ici de l’histoire de NOURY Saïd.

Né dans une famille riche, NOURY Saïd, avait fait ses études à l’Académie militaire d’Istanbul. Opportuniste jusqu’au bout des doigts, il tomba entre les mains des anglais quand ceux-ci occupèrent Bassora pendant la première guerre mondiale. Il leur offrit ses services, c’est le propre des traîtres. Quelque mois plus tard, on le trouvait auprès du fameux colonel Thomas Edward LAWRENCE, plus connu sous le nom de LAWRENCE d’Arabie, fomentant "la révolte arabe entre 1916 et 1918".

Les anglais le mirent à la disposition de FAYSAL, fils du Chérif de la Mecque, qui devint, en 1921, Roi d’Irak. Dès 1930 sur la pression de Londres, il devenait premier ministre d’Irak, poste qu’il devait occuper pendant une longue période. Piètre orateur, parlant mal l’arabe, il détestait le Président égyptien Gamal Abdel NASSER qui l’accusait ouvertement d’être un agent au service de l’intelligence service britannique.

Les masses irakiennes le détestaient et priaient pour son malheur dans les mosquées. Car, dans la réalité, il dirigeait et orientait le gouvernement irakien dans le sens des intérêts britanniques, c’était un traite et un félon. Lors de la révolution irakienne du général Abdel Karim KASSEM le 14 juillet 1958, qui mit fin à la monarchie en Irak, NOURY Saïd, tenta de fuir en se déguisant en femme, mais reconnu il fut abattu. Son corps, traîné dans la ville de Bagdad, provoqua la joie et les applaudissements de la population en liesse .

Il fut jeté sous des voitures jusqu’à l’aplatir et à le rendre méconnaissable. Telle était, et est toujours, la haine des masses, contre la traîtrise et la félonie politique que nous connaissons au quotidien dans ce vaste tiers monde dont nous sommes les fils.

Nous rappelons ici pour mémoire qu’après la fuite de Jean-Claude DUVALIER, le peuple en colère avait détruit le Tombeau du père DUVALIER et que les restes mortuaires de feu le président François DUVALIER d’Haïti, furent traînés dans les rues de Port-au-Prince le 7 février 1986, avant d’être aspergés d’essence et brûlés dans une liesse populaire. Quant au président Samuel KANYON DOÉ du Liberia, il fut capturé, torturé, tué et découpé en morceaux comme un sanglier par ses opposants le 9 septembre 1990.

Nous n’approuvons pas ces méthodes macabres et expéditives, mais la félonie et la traîtrise se paient au prix fort, car très souvent, elles ne laissent pas d’autres choix aux foules enragées de douleurs et de souffrances, qui du jour au lendemain, brisent les chaînes de l’oppression et de la servitude .

Que tous ceux qui acceptent, aujourd’hui encore, d’être les agents des intérêts étrangers, ceux qui choisissent le chemin de la félonie et de la traîtrise contre leur peuple et leur propre pays se souviennent du sort que la foule en colère et la rue avaient réservé à NOURY Saïd, dans l’après-midi du lundi 14 juillet 1958, dans Bagdad en liesse.

Conclusion générale

Notre continent, l’Afrique, se trouve à un carrefour important de son histoire douloureuse dans laquelle les grandes et petites trahisons ont occupé une grande place. Il est temps d’affronter courageusement nos problèmes sans faux-fuyant pour arracher nos pays des mains des eunuques qui nous dirigent, pour que l’homme africain quitte les soutes froides et sombres de l’histoire.

Souvenons-nous qu’à l’ouverture du sommet des chefs d’États francophones de Cotonou du 2 au 4 décembre 1995, le président français, Jacques CHIRAC avait sollicité une minute de silence à la mémoire de son ami, le dictateur rwandais Juvénal HABYARIMANA, sans avoir un seul mot de compassion pour les milliers de morts du génocide rwandais, perpétré par l’armée mono ethnique hutue du défunt président HABYARIMANA. Quand les Rwandais parlent des complicités françaises dans le génocide qui a ravagé leur pays, nous voici devant une des évidences.

Cela ne nous étonne pas, car la France a toujours, par lâcheté et par traîtrise, honoré les dictateurs au détriment des peuples africains. C’est bizarre qu’aucun des chefs d’États africains présents n’ait élevé la moindre protestation devant un tel étalage de cynisme. Ce jour-là, les Africains découvraient effarés et avec tristesse qu’ils sont dirigés par des eunuques.

"Lorsque dans un moment de lucidité, l’on sait la direction définie, il nous appartient de la réaliser ou trahir". C’est ce que nous disait, hier encore, notre frère Frantz FANON, ce médecin psychiatre antillais qui en soignant les fous voulait aussi sauver les hommes. Il avait quitté son poste de médecin à l’hôpital psychiatrique de Blida pour rejoindre la lutte de libération du peuple algérien.

Dans son livre "Les damnés de la terre", il évoque ce qu’il appelle les "nègres blancs". Il désigne, par là, les dirigeants des anciennes colonies qui, bien que leur pays soit devenu indépendant, se comportent comme des laquais.

À cet égard nous pouvons regarder l’attitude des dirigeants politiques membres du réseau franco-africain, très souvent absents aux réunions des organisations africaines d’intégration économique et qui se précipitent à la table du président français comme des nègres blancs, des laquais, voire même comme des eunuques dévoués corps et âme à leur souverain.

Dans l’empire Ottoman et dans l’empire du Milieu, les eunuques qui étaient des hommes castrés chargés de la surveillance du harem impérial, mais aussi constituaient une redoutable garde rapprochée très dévouée à l’empereur, ne pouvant pas procréer et incapables de fonder une dynastie, haïssaient et méprisaient leur propre peuple envers lequel ils n’avaient aucun devoir.

Nous sommes dans le même cas de figure avec la plupart des élites politiques africaines de l’espace francophone, castrées, frappées de stérilité, incapables de féconder le bonheur commun et le vivre ensemble, elles se mettent au service de la France, méprisant leur peuple à qui elles ne doivent rien. Par lâcheté et par traîtrise, elles sont plus fidèles à la France qu’à leur propre pays.

Car ces dirigeants savent que le danger, contre leur régime, viendra du peuple et du suffrage universel qu’ils méprisent, ils ont donc renoncé à la souveraineté de leur pays et tueraient leur mère pour plaire à la France qui est la nation européenne qui a avalisé les élections truquées qui leur ont permis d’arriver au pouvoir ; ils ne doivent rien au peuple.

Voilà pourquoi ils retardent son progrès et son bonheur en l’enfonçant un peu plus, chaque jour que Dieu fait, dans l’obscurantisme et des aberrations de type stalinienne. Telle est la triste réalité qui découle du drame des trahisons successives que vivent les peuples africains.

Beaucoup d’Africains expliquent d’ailleurs les pillages qui accompagnent la chute de nos régimes politiques par un excès de colère populaire, qui s’attaque au symbole de richesse et d’opulence du régime déchu. Car disent-ils ce sont ces choses matérielles qui les rendent insensibles au sort de la majorité de leurs compatriotes. Le pillage, considéré par les populations comme une forme de redistribution démocratique, c’est aussi la réponse du petit peuple à la trahison des élites.

C’est justement pourquoi, très souvent, après le pillage, la populace en colère met le feu au domicile des membres de la nomenklatura pour exorciser la félonie, le diable et le mal dont ils sont porteurs, mal qui vit en eux et qui les a conduits au mépris, à la suffisance, et à la trahison des valeurs communes.

De HOUPHOUËT-BOIGNY à Ahmadou AHIDJO, de Joseph Désiré MOBUTU à Jean Bedel BOKASSA, de Maurice YAMÉOGO, à Étienne ÉYADEMA, de Blaise COMPAORÉ, à Denis SASSOU NGUESSO, de Idris DÉBY à Paul BIYA en passant par François BOZIZE et El Hadj Ali BONGO ODIMBA, nous vivons aujourd’hui encore le temps des eunuques. Une période qui marque le triomphe de la trahison, de la lâcheté et celui de l’arrogance de ceux qui représentent les intérêts étrangers dans leur propre pays.

Il faut que cela change ! En effet il nous faudra deux fois plus de courages, aujourd’hui, pour répondre à l’immense besoin de justice de nos populations africaines. D’une meilleure redistribution des biens, d’une organisation plus équitable de la société africaine, avec d’avantage de participation, une conception plus désintéressée du service public au profit de tous.

Il y a, aujourd’hui, des violations sélectives et massives des droits de l’homme qui affectent la société africaine dans son ensemble. Cela nous amène à exprimer ici le désir légitime pour la population : les médias et la politique d’une libre expression respectueuse des opinions des autres et des biens communs au service de tous et non de quelques-uns.

Par exemple, avoir aussi, chez nous, des routes praticables en toutes saisons, manger à sa faim, se soigner, boire de l’eau potable, avoir un logement décent, un travail honnête, une pension pour ses vieux jours, le respect des responsabilités familiales, scolariser ses enfants, car la victoire de l’Afrique sur l’analphabétisme est à ce prix.

Bref, tout ce qui fait que les enfants, les vieillards, les hommes, et les femmes d’un pays puissent mener une vie vraiment humaine. Nous faisons appel à nos amis européens, à nos élites politiques, à tous ceux qui disposent de la richesse, de la culture et du bon sens, pour qu’ils comprennent leur grave et urgente responsabilité.

Dans cette voie, nos élites politiques doivent être moins hautaines et méprisantes ; elles doivent éviter d’étaler l’or et les richesses acquis sur le dos et la sueur des populations. Il faut être moins suffisant, moins médiocre et très humble. L’humilité est un capital d’avenir dans la vie politique.

La clé de cette alternative passe par le suffrage universel. Il faut tourner le dos à la lâcheté, à l’arrogance, à la fourberie et aux mensonges pour embrasser le courage, le courage des peuples africains, dont le travail et l’ardeur au combat ont été piétinés, car au final, nous avons détruit l’ancienne maison, sans construire la nouvelle.

Nous sommes aujourd’hui au bord de la route, sous la pluie, sans toit, livrés à nous-mêmes, dans un monde d’égoïsme institutionnalisé. L’humilité et la fidélité aux combats de nos peuples africains, demeurent la clé des temps nouveaux. Comme l’écrivait si bien notre frère, le poète haïtien, Jacques Stéphane ALEXIS : "Nous resterons fidèles, jusqu’à plus ample démonstration, à la formule selon laquelle le peuple, pris dans sa nasse, est la seule source de toute culture vivante ; il en est en quelque sorte la base, le fondement sur lequel viennent rejaillir les apports des hommes de cultures".

C’est parce que nous avons très souvent été trahis que notre soif de justice et de reconnaissance est plus grande. Reconnaissance dans la redistribution, reconnaissance de la nation qui doit désormais être le partenaire de tous les citoyens pour se raccorder à elle-même afin de ne plus se trahir et conduire le peuple aux amers désillusions d’hier. C’est de cela qu’il s’agit.

Médecins sans résidence...

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mardi 6 avril 2010

Congo Brazzaville : Retour à la case départ sur l'endettement

La Banque mondiale (BM) va accorder un don de 25,5 millions de dollars à la République du Congo pour accompagner la mise en oeuvre du projet eau, électricité et développement urbain (PEEDU) dans les 2 principales villes du pays, Brazzaville et Pointe Noire, a-t-on appris dans un communiqué de cette institution. Ce financement sera complété par une contrepartie du gouvernement congolais pour un montant de 100 millions de dollars, précise le communiqué. Le PEEDU a pour objectif d'accroître l'accès durable des habitants des zones ciblées des villes de Brazzaville et de Pointe — Noire aux infrastructures de base, aux services et à l'eau potable. Ce projet va s'exécuter sur une période de 5 ans et la réalisation des activités éligibles du PEEDU touchera près de 1. 200.000 habitants dans les villes précitées.

Source le courrier du Vietnam  sous le titre : République du Congo : la BM finance des projets de développement urbain http://lecourrier.vnagency.com.vn/default.asp?page=newsdetail&newsid=61411

mardi 23 mars 2010

Congo Brazzaville un pays pauvre, mais assez riche pour se payer des armes de destruction massive

Le pouvoir du Congo-Brazzaville, revenu avec véhémence sur la scène politique par une sanglante guerre civile en 1997 continue de faire parler de lui dans le sens négatif en achetant les armes de destruction massive de la Corée du Nord qui pourtant est sous embargo de l’ONU.

Denis Sassou Nguesso viole les lois internationales en achetant ces armes qui ne servent qu’a effrayé une population qui déjà meurtrie par la guerre de 1997 et vit dans l’insécurité et la peur quotidienne de voir leur pays s’embraser de nouveau. Dites-nous de quelle paix Denis Sassou Nguesso parle-t-il. De qui a-t-il peur?

Aujourd’hui, confronté à l’épreuve redoutable de la réalisation des promesses stériles qu’il a faites aux Congolais lors de son discours d’investiture, le pouvoir cherche à divertir les Congolais et l’opinion internationale à travers multiples procès farfelus contre l’opposition.
La fameuse enquête ouverte par la gendarmerie nationale à la suite de la marche pacifique de l’opposition du 15 juillet dernier a conclu que le dossier était vide. C’est justement la principale raison qui avait fait que les mesures arbitraires d’interdiction de sortie du territoire national et d’assignation à domicile à Brazzaville qui frappait quelques leaders de l’opposition ont été levées depuis fin octobre 2009.

C’est comme un voleur qui a pris plaisir à voler, il finira toujours par revenir voler, puisqu’il en a pris l’habitude. Le pouvoir n’ayant rien de promettant pour son peuple, essaie de camoufler son incompétence, par des diversions de toutes sortes.

En effet, le pouvoir de Brazzaville vient encore de convoquer M. Ange Édouard Poungui pour une énième fois pour les mêmes raisons d’il y » a six mois. Le Congo-Brazzaville notre pays est dirigé par des irresponsables qui sont devenus des adeptes des coups bas sans vergogne, au lieu de lui présenter des excuses (ainsi qu’à tous les autres leaders frappés par l’arbitraire) et l’indemniser, pour de fausses accusations, parce que le dossier étant absolument vide. Le candidat de taille de l’UPADS à la présidentielle de juillet 2009 est convoqué au tribunal de grande instance de Brazzaville ce 4 février 2009. Cette convocation lui a été envoyée et signée par la main du magistrat Itoua Priva Roméo P.

Un trafic d’armes a été mis à jour par les autorités sud-africaines. Merci aux autorités de l’Afrique du Sud d’être vigilants pour leurs frères d’Afrique centrale qui ont de tout temps dénoncé l'Apartheid au prix de nombreux sacrifices.

Les autorités de ce pays ont intercepté une cargaison d’armes de guerre à destination du Congo-Brazzaville. À quoi servent autant d’armes de guerre dans un pays qui, aux dires des autorités politiques, est pourtant pacifié? Question que l’on est en droit de se poser.
Le Congo est-il en guerre contre un État voisin? Ce régime considère donc profondément sa propre population comme un ennemi. Il s’équipe d’armes, qui utilisés sur le nombre de la population congolaise, devraient être considérés comme des armes de destruction massive. Dire que certains pays ont été mis à feu et à sang, parce que l’on suspectait un dictateur d’être en possession de telles armes…

Fait saillant, l’homme de Mpila, « élu » au mieux par 10 % de la population, a bataillé bec et ongle pendant plusieurs années pour inscrire le Congo dans la zone de pays pauvre très endetté (PPTE) avec l’aide de la banque mondiale et du FMI. Bien que le Congo n’est pas un pays pauvre comme le prétendent les responsables politiques. L’endettement dont ils font allusion n’étant occasionné en très grande partie que par la gabegie du régime et de ses amis.
Le Congo, regorge d’importantes ressources naturelles, dont en partit le pétrole qui constitue sa principale source d’enrichissement à près de 76 % du budget de l’état, et 95 % des exportations. Outre l’or noir, le Congo possède aussi d’énormes étendues forestières, gérées entre autres par ces mêmes décideurs.

La question qui se pose (que les Congolais se posent), comment se fait-il que la Banque mondiale et le FMI aient pu permettre l’entrée du Congo dans la zone PPTE? Et comment
ces deux grandes institutions internationales expliquent-elles l’achat massif d’armes de guerre par le Congo-Brazzaville à la Corée du Nord? Et comment un pays pauvre, très endetté peut se permettre de dépenser autant d’argent pour acheter des armes qui serviront de toute évidence à exterminer sa propre population? Sans oublier les armes qui ont été achetées peu avant les élections présidentielles de juillet 2009, dont nous relatait l’hebdomadaire français le « Canard enchaîné » du ……… 2009 :

« Le pouvoir de Brazzaville a fait une commande de 7 (sept) BM-21 Ural, 4 (quatre) RM-85 de marque tchèque, 4 (quatre) avions de Chasse Sukhoi 47, 2 (deux) MIG-27, 1 (un) F-7 chinois, 4 (quatre) nouveaux hélicoptères de combat MI-24, 3 (trois) MI-28 et un hélicoptère WZ-10.
En outre, une commande importante d'appareils de communication, des tenues militaires chinoises, une importante livraison d'armes de combat chinoises : des QBZ-95 et 97, des AK-47 et 74, ainsi que des Famas de l'armée française achetée en République tchèque, ainsi qu'une cargaison des SAR-21 achetées à Singapour en juin 2007 par son fils et son conseiller Dominique OKEMBA, toutes ces armes seront acheminées au Port de Pointe-Noire d'ici la fin de l'année 2008. Ces importantes livraisons d’armes et d’appareils militaires seront livrées au Congo cette année 2008, des contrats ont été signés entre le pouvoir de Mpila et le gouvernement de Pékin, et en contrepartie, le pouvoir de Mpila livrera d’importantes cargaisons de pétrole à la chine, les livraisons ont débuté depuis mars 2004".

Le choix de la communauté internationale est donc d’aider un pays si pauvre qu’il ne peut payer ses dettes, éduquer, soigner et nourrir sa population de façon convenable, en lui fournissant des moyens pour payer les armes les plus modernes, des armes de destruction massive, destinées à sa milice personnelle, pour assassiner ceux qui légitimement contestent la misère que ce régime lui impose.

Le peuple congolais a souffert de diverses calamités causées par ce perfide de Mpila notamment en utilisant les armes pour revenir au pouvoir et de s’y imposer jusqu’à nos jours.

La Banque mondiale et le FMI en attribuant ce statut de PPTE au Congo, sont responsables sinon des complices de troubles socio-politiques et la misère que vit le peuple congolais. Où sont donc les beaux principes des grandes puissances? Ne s’intéressent-elles à nous, misère du monde, que quand un génocide est accompli? Que quand un tremblement de terre a tout ravagé? On avait espéré les leçons du Rwanda tirées, et que les mêmes erreurs ne se reproduiraient plus. Malheureusement, la vie d’un noir africain ne fait décidément pas le poids sur la balance avec “l’or noir”, avec le sacro-saint intérêt des grandes puissances. Et l’ONU dans tout ça? Pas un mot! Au passage, l’ONU est la responsable de l’embargo sur les armes infligée à la Corée du Nord? Décidément, le droit de veto est un droit que se sont octroyé ces “grandes puissances” sur nos vies… ou nos morts. Tel César dans une arène romaine, le sens du pouce nous condamne ou nous sauve.

Dans le discours de son investiture, Denis Sassou Nguesso prônait la démocratie et la paix, je vous présente ses propres récits tels que prononcés devant les invités venus de tous les coins du monde. Je cite : “Vivre ensemble, bâtir ensemble, dans la paix : C’est à ce prix que le Congo va gagner le pari de la modernisation et de son industrialisation.
Vivre ensemble, bâtir ensemble dans la paix : telle est la condition sine qua non pour assurer la promotion et le renforcement de la démocratie, de l’État de droit, des libertés, de toutes les libertés. Telle est la condition pour consolider les acquis de l’indépendance nationale ‘. Fin de citation.

Les institutions internationales en agissant de la sorte encouragent le pouvoir de Brazzaville dans le non-respect des libertés et droits de l’homme. Ces institutions font la sourde oreille et restent insensibles aux cris de désespoir du peuple congolais qui subit avec dignité les coups et humiliations du dictateur.

La Banque mondiale et le FMI qui jadis étaient une référence pour les pays du sud se présentent aujourd’hui comme des bailleurs de fonds pour les dirigeants corrompus des pays pauvres et du coup, ne jouent plus leur rôle essentiel.
Cette attitude qui est la leur ne fait que retarder le développement de ces pays d’Afrique, qui en réalité se font voler.
Toutefois, il n’est pas trop tard pour agir, au vu de tous ces faits avérés (achat massif de puissantes armes de guerre). Ces deux institutions et l’ONU se doivent de relancer et mettre en place toutes les bases nécessaires pour la stabilité et la démocratie en Afrique, au Congo en particulier.

Et dans tout ce chaos, où sont la France ou du moins les politiques françaises et l’Union européenne? Le principal allié occidental du régime tyrannique de Brazzaville étant la France, cette dernière ne pourra se réfugier dans un, ‘nous ne savions pas’. Les puissances alliées de la France, dont l’Union européenne, on ne ramenant pas la France à ses obligations morales, est-elle aussi complice de la tyrannie subite par le peuple congolais.
Est-ce que la France est au courant de ces achats d’armes de guerre?
Si la France n’est pas au courant de cette affaire, pourquoi alors les instruments militaires français sont attendus à Brazzaville comme le stipule le paragraphe ci-dessous?
‘Quelques semaines auparavant, sans moins de panache, le Congo-Brazzaville annonçait l’arrivée prochaine des instructeurs militaires français. Pour une mission de formation en génie militaire. L’école nationale à vocation régionale (ENVR) spécialisée dans les travaux publics et le bâtiment devrait être fonctionnelle en septembre 2010. (sources bien informées) — mwinda».

À l’instar de l’Algérie, un jour l’Afrique noire demandera des comptes à tous ceux qui, d’une façon ou d’une autre, ont permis que des vies innocentes soient détruites pour que le confort des dictateurs et de leurs alliés soit assuré. Il est encore temps de stopper la machine de guerre du dictateur de Brazzaville. Nous en appelons à ce qui reste de la conscience de ‘ces grands’ du monde.
Tout comme tous les peuples du monde, nous n’aspirons qu’à vivre libres, heureux et en paix avec nos frères. Nous voulons voir nos enfants et les enfants de nos enfants vivre en harmonie sur la terre de nos ancêtres. Les apôtres de la tyrannie, de la division et de l’écrasement des idées des autres par des armes de destruction massive, devraient savoir que ces méthodes inhumaines sont d’un autre temps, et qu’un jour, même eux, ainsi que leurs complices pourront être rattrapés par un tribunal pénal international. Nous demandons à ces faiseurs de veuves, d’orphelins, d’apatrides, de changer leur énergie destructrice, et plus tôt que de planifier l’extermination de leurs concitoyens, de construire des écoles, des hôpitaux, et d’œuvrer pour une réconciliation véritable de tous les Congolais.

Congo Diaspora

lundi 22 mars 2010

A VIE ET L’OEUVRE DE MARIEN NGOUABI

LA VIE ET L’OEUVRE DE MARIEN NGOUABI

Ne le 31 décembre 1938 à Ombele, petit village situé à une dizaine de kilomètres de Fort-Rousset (Owando), en pays Kouyou, dans le département de la Cuvette Congolaise, Marien Ngouabi est le fils de Dominique Osséré m’Opoma et d’Antoinette Mboualé-Abemba. Aux débuts des années soixante, il épouse en premières noces Clotilde Martin, de nationalité française. De cette union naissent deux garçons. En secondes noces, il épouse Céline Mvouka. De son second mariage naissent plusieurs enfants, dont un posthume.
C’est un homme affable et sans affectation. D’une simplicité proverbiale, il n’a aucun goût pour le faste et le luxe. De caractère trempé et homme de décision, il fait preuve dans les circonstances décisives d’un courage exceptionnel et d’une grande promptitude à l’action. Marxiste et patriote convaincu, autant que dirigeant désintéressé, il recourt volontiers aux meetings populaires pour expliquer son action.
Passionné de sport, il s’adonne volontiers aux joies du saut en parachute et à la pratique du football.
Formation et Carrière militaire [modifier]
De 1947 à 1953, il fait ses études primaires à Fort-Rousset. En 1953, il entre à l’École militaire préparatoire Général Leclerc de Brazzaville. Il en sort en 1957 et est affecté à Bouar, en Oubangui-chari (future République centrafricaine).
De 1958 à 1960, il fait partie du deuxième bataillon des tirailleurs du Cameroun, avec le grade de sergent. A ce titre il participe à la guerre coloniale que les Français livrent aux populations camerounaises.
En 1960, à la faveur de l’indépendance du Congo, il est admis à suivre une formation d’officier en France. D’abord l’Ecole Militaire Préparatoire de Strasbourg, puis à l’École militaire interarmes de Saint-Cyr. Il a pour camarades de promotion ses compatriotes Joachim Yhombi-Opango, Louis Sylvain-Goma et Luc Kimbouala-NKaya.
En 1962, il revient au Congo avec le grade de sous-lieutenant. Il est affecté à la Garnison de Pointe-Noire en qualité d’Adjoint au Commandant du Bataillon d’Infanterie. L’année suivante, il est promu au grade de lieutenant.
En 1965, de retour à Brazzaville, devient capitaine et commande le tout nouveau bataillon parachutiste des Forces Armées Congolaises.
En 1 octobre 1968, il devient commandant.
Au début des années soixante-dix, il entreprend des études de physique à l’École Supérieure des Sciences de Brazzaville. Il obtient un Diplôme d’Études Approfondies.
L’irruption en politique (1966-1968) [modifier]
En 1966, Ngouabi est membre du Comité Central du Mouvement National de la Révolution (MNR), le parti unique. Il y représente l’armée. Comme plusieurs officiers, il vit mal les changements opérés dans l’armée par le pouvoir politique. L’année précédente, suite à l’évasion de l’ancien président Fulbert Youlou, la Jeunesse du Mouvement National de la Révolution (JMNR) avait été pourvue d’une branche armée, dénommée ’’’Défense Civile’’’. Puissamment équipée, son rôle est de défendre la Révolution et la Nation.
Le 22 juin 1966, l’Assemblée Nationale vote une loi transformant les Forces Armées Congolaises (FAC) en Armée Populaire Nationale (APN). Une direction politique à l’armée et un Haut Commandement collégial sont créés. Les deux sont dirigés par une commission civile coiffée par un officier membre du parti, qui a rang de Commandant en chef de l’APN. Le capitaine Ngouabi s’insurge contre cette inféodation de l’armée au politique et émet de vives critiques à l’endroit du président Massamba-Debat. En guise de punition, il est muté à Pointe-Noire. Ayant refusé cette affectation, il est mis aux arrêts et rétrogradé au rang de soldat de première classe par Massamba-Debat. Des membres de son ethnie manifestent dans Brazzaville pendant deux jours (les 27 et 28 juin) pour réclamer sa libération. Les militaires de son bataillon, le Groupement aéroporté, se mutinent. Ils occupent des bâtiments gouvernementaux et mettent à sac la permanence du parti. Le Chef d’État-major, le commandant Mountsaka, accouru à la base militaire de Maya-Maya pour les faire rentrer dans le rang, est fait prisonnier et mis au cachot. Finalement, la Défense Civile parvient à rétablir l’ordre. Ngouabi est remis en liberté et rétabli dans son grade.
L’épreuve de force lui a valu une certaine stature dans l’armée et il s’impose comme le chef de file des officiers progressistes qui souhaitent une politique plus à gauche de la part du gouvernement. Affecté au bureau d’études de l’État-major, il publie un ouvrage intitulé « Soldat du peuple ».
Au début de l’année 1968, le climat politique se dégrade. Massamba-Debat démet Ambroise Noumazalaye et décide d’assumer lui-même la fonction de Premier ministre. Durant le mois de juillet, la tension est paroxystique. De plus en plus contesté par la classe politique, Massamba-Debat fait arrêter Ngouabi et le lieutenant Eyabo, le 29 juillet, pour activisme politique trop prononcé. Le Groupement aéroporté se mutine de nouveau. Un détachement de para commandos conduit par l’adjudant Akouala libèrent les deux prisonniers, le 31. Habilement, Ngouabi et ses troupes investissent la Maison d’arrêt de Brazzaville et sortent de prison le commandant Mouzabakani et le lieutenant Kinganga, emprisonnés depuis plusieurs mois pour tentative de déstabilisation du régime. Ils enfoncent ainsi un coin au sein des populations du Pool et s’attirent la sympathie d’une certaine fraction de cette communauté. Au sein des populations originaires de la région natale de Massamba-Debat, la division est réelle entre les bakongo, solidaires du Président, et les autres ethnies, nostalgiques de Fulbert Youlou.
Alors que les positions se durcissent et que le pays est au bord de la guerre civile, Massamba-Debat, affaibli par la défection du commandant de la Défense Civile, Ange Diawara, se voit contraint de prononcer l’amnistie tous les prisonniers politiques. Ngouabi devient le point de convergence des nombreuses oppositions au Chef de l’État : officiers progressistes, officiers de droite dont Mouzabakani est la figure de proue, faction Noumazalaye et faction Lissouba.
La prise de pouvoir (août – décembre 1968) [modifier]
Le 3 août, alors que Massamba-Debat a quitté le palais pour son village natal, laissant le pouvoir vacant, l’armée publie un communiqué invitant le Président de la République à reprendre ses fonctions. le communiqué précise que le lieutenant Poignet, Secrétaire d’État à la Défense Nationale, assure l’intérim. D’autorité, les responsables militaires annoncent aussi la nomination de Ngouabi comme Commandant en chef de l’APN, en remplacement du capitaine Ebadep, et celle du capitaine Sylvain-Goma comme Chef d’État-major, en remplacement du capitaine Kimboula-Nkaya.
La négociation entre les nouveaux hommes forts de l’armée et Massamba-Debat, revenu à Brazzaville, s’ouvre le 4 août. Elle aboutit le 5 août, à la formation d’un nouveau gouvernement et à la constitution d’un Conseil National de la Révolution (CNR), de 39 membres. Douze officiers font partie du CNR, dont Ngouabi, Raoul, Kimbouala-Nkaya et Sassou N’Guesso. Massamba-Debat a aussi accepté de former un nouveau gouvernement. La nouvelle équipe reflète l’improbable équilibre établi après l’épreuve de force (Lissouba au Plan, Mouzabakani à l’Intérieur, Matoumpa-Mpolo à l’Information, etc).
Le 16 août, un Acte fondamental abroge la constitution de 1963 et institue légalement le CNR, organe législatif provisoire. C’est le véritable lieu du pouvoir. Il est présidé par Marien Ngouabi, alors que Massamba-Debat n’en est que simple membre. Le fonctionnement du CNR dépouille de fait le Président de la République du pouvoir réel. Le 20 août, le commandant Alfred Raoul est nommé Premier ministre, par décision du CNR.
Fin août, après la décision du CNR d’incorporer la Défense Civile dans l’APN, la tension monte de nouveau. Les derniers partisans de Massamba-Debat au sein de la Défense Civile se retranchent au camp de la météorologie de Bacongo. Le 29 août l’armée donne l’assaut. Au bout de 3 jours d’affrontement, c’est la reddition des partisans du Président. Le 4 septembre, devant à l’érosion de son pouvoir, Alphonse Massamba-Debat démissionne de sa fonction de Président de la République. Il est aussitôt emprisonné.
Le 7 septembre, le CNR aménage l’Acte fondamental et supprime la fonction de Président de la république. Le Premier ministre Raoul est chargé d’assurer l’intérim à la tête de l’État jusqu’à la mise en place d’institutions définitives. En réalité, depuis la mise en place du CNR, Marien Ngouabi est le véritable homme fort du pays.
Le 31 décembre 1968, l’Acte fondamental est de nouveau modifié. Le CNR, remanié et réduit à 28 membres avec la mise à l’écart des proches de Massamba-Debat, devient l’organe suprême de l’État. Le chef du Conseil est de droit Président de la République. Marien Ngouabi devient ainsi le troisième Président du Congo, à l’âge de 30 ans.
Il prend la tête d’un pays de 1 000 000 d’habitants, dans l’économie repose sur l’agriculture (vivrière et d’exportation, notamment café et cacao), l’exportation du bois, l’exploitation minière et le transport. Dans ce dernier domaine, ses infrastructures (CFCO, Voie Comilog, Voie fluviale et Port de Pointe-Noire) et sa situation géographique lui permettent de jouer un rôle de transit pour d’autres pays de la sous région (Gabon, Cameroun, Centrafrique, voire Tchad). Le Congo dispose également d’une industrie agro-alimentaire et textile naissante, pour partie privée et pour partie étatique. Les services publics, quoique modestes, fonctionnent correctement. La corruption a été presque totalement éradiquée par le régime de Massamba-Debat. La situation financière de l’État est saine. Le grand handicap du pays consiste en sa faiblesse en ressources humaines de haut niveau. Le Congo ne dispose que d’une poignée d’universitaires, ingénieurs, juristes ou expert-comptables et de moins d’une centaine de médecins. Cependant, avec un taux de scolarisation de 95% au primaire, tous les espoirs semblent permis.
Des sa prise de fonction, Ngouabi confirme Alfred Raoul au poste de Premier ministre. Celui-ci constitue un nouveau gouvernement dans lequel Mouzabakani ne figure pas.
A l’opposé de ses prédécesseurs, Ngouabi n’occupe pas le Palais du Peuple, résidence du Président de la République depuis l’indépendance. Il préfère demeurer au Grand Quartier Général de l’APN où une résidence est aménagée.
La consolidation du pouvoir (1969-1971) [modifier]
Au cours des premières années de pouvoir, Marien Ngouabi entreprend la reconstruction politique de la société congolaise sur le modèle soviétique. En cela, la rupture est nette avec les années Massamba-Debat, dont la référence était la Chine communiste. Les institutions politiques sont remodelées sur le canevas des pays d’Europe de l’Est. La coopération avec , l’URSS, la RDA, la Tchecoslovaquie, la Roumanie et Cuba est renforcée.
Sur le plan économique, cependant, il n’y aucun bouleversement. Le ton est certes moins convivial vis-à-vis des pays occidentaux, mais leurs intérêts économiques dans l’industrie, le commerce et les services ne sont guère remis en question. Les nationalisations restent limitées et le Congo est toujours demandeur de la coopération technique et des capitaux occidentaux, français notamment. Les sociétés Elf-Congo et Agip recherche Congo sont même créées dès 1969, par association de l’État congolais, minoritaire, avec respectivement la société française ERAP et italienne Agip dans le domaine de la prospection et l’exploitation pétrolière.
La consolidation du pouvoir de Ngouabi se heurte à des tentatives multiples de déstabilisation. En février 1969, il réorganise l’Armée et crée une Cour révolutionnaire de Justice, chargée de juger ceux qui ont mené des activités néfastes au bon fonctionnement du MNR depuis 1963. Quelques jours plus tard, Mouzabakani, soupçonné de préparer un coup d’état, est arrêté en compagnie d’autres officiers. Kinganga également impliqué, s’enfuit à Kinshasa. La cour révolutionnaire, présidée par Simon-Pierre Ngouoniba-Nsari qui est secondé par Christophe Moukoueke, condamne Mouzabakani aux travaux forcés à perpétuité en juillet. Ses complices (André Loufoua, Firmin Mouzabkani, Joseph Senso,…) écopent de peines diverses.
Le 19 juin, le capitaine Kikadidi, Foueti et 17 autres personnes sont arrêtés pour tentative de coup d’état en faveur de l’ex-président Massamba-Debat. Ils sont condamnés à des peines d’emprisonnement diverses et Kikadidi est radié de l’armée.
En août 1969, la JMNR se transforme en Union de la Jeunesse Socialiste Congolaise (UJSC).
Le 16 octobre 1969, l’ancien président Massamba-Debat, remis en liberté quelques mois plus tôt, est de nouveau arrêté pour les événements de juillet-août 1968 et pour les assassinats perpétrés durant son mandat. Plusieurs de ses anciens collaborateurs sont emprisonnés avec lui. La Cour révolutionnaire ne parviendra pas à mettre en évidence l’implication de l’ancien président dans les assassinats perpétrés sous son mandat et l’acquittera un mois plus tard. Ses anciens collaborateurs (Lissouba, Noumazalaye, Lounda, Claude-Ernest Ndalla, sont également acquittés. Cependant ils sont tous interdits de toute activité politique et sortie du territoire pour deux ans.
Le 7 novembre 1969, Bernard Kolelas est arrêté pour tentative de coup d’état. Déjà condamné à mort par contumace en 1965 pour actes de terrorisme, il est revenu d’exil un an plus tôt après son amnistie par Ngouabi et a réintégré la fonction publique. Le 14 novembre, une cour martiale le condamne à la peine de mort, ainsi que 3 de ses complices. La peine est confirmée par la Cour révolutionnaire deux semaines plus tard. Cependant, la sentence ne sera pas exécutée.
Du 29 au 31 décembre 1969 a lieu le congrès constitutif du Parti Congolais du Travail (PCT), parti unique d’avant-garde, d’idéologie marxiste-lenniste. Claude-Ernest Ndalla et Moungounga Nkombo Nguila ont en rédigé les statuts. La nouvelle constitution est promulguée à cette occasion, La dénomination officielle du pays devient République Populaire du Congo. Les symboles de la république sont changés. Le drapeau tricolore (vert-jaune-rouge) est remplacé par un drapeau rouge avec une houe et un marteau jaunes entrecroisés, entourés de 2 palmes vertes. Les Trois glorieuses remplace La congolaise comme hymne national. Le parlement est supprimé.
Le PCT, parti unique, est dirigé par un Comité central de 30 membres, élus par le Congrès du parti pour 5 ans. Un Bureau politique de 8 membres est chargé de veiller à la mise en œuvre des décisions du Congrès et du Comité central. C’est le cœur du pouvoir politique au sein du régime. Le Président du Comité central, élu par le Congrès, est Président de la république. La nouvelle constitution consacre véritable confiscation du pouvoir par une faction politique. Il n’y a pas de représentation nationale et les membres du parti sont recrutés par cooptation. Le Chef du PCT, désigné par ses pairs, est intronisé d’office Chef de l’État sans être soumis au suffrage du peuple, contrairement au régime précédent. L’organe exécutif de la république est dénommé Conseil d’État, et il est présidé par le Chef de l’État, qui est secondé par un Vice-président du Conseil d’État. Le poste de Premier ministre est supprimé.
Trois organisations de masse sont chargées d’encadrer les différentes composantes de la population : la Confédération Syndicale Congolaise (CSC), l’Union Révolutionnaire des Femmes Congolaises (URFC) et l’Union de la Jeunesse Socialiste Congolaise (UJSC). L’Union Nationale des Écrivains et Artistes Congolais (UNEAC) sera créée quelques années plus tard.
Le 7 janvier 1970, Marien Ngouabi est investi à la tête du parti et de l’État pour 5 ans. Il nomme Alfred Raoul Vice-président du Conseil d’État.
Dans le cadre de la mise en place d’une économie socialiste, l’Agence Trans-Equatorial de Communication (ATEC) qui gère le transport ferrovière et fluvial est nationalisée en mars 1970 et devient l’Agence Transcongolaise de Communication (ATC). La Société Industrielle et Agricole du Niari, filiale des Grands Moulins de Paris, est nationalisée en novembre de la même année.
Le 23 mars, le lieutenant Kinganga, en exil à Kinshasa depuis sa tentative présumée de juin 1969, débarque à Brazzaville à la tête d’un commando, et tente de renverser le régime de Ngouabi. Sa tentative échoue et il est abattu aux abords de la radio nationale qu’il venait d’investir. Son cadavre et celui des membres de son commando tombés avec lui restent longtemps exposés devant l’immeuble de la radio. Plusieurs jeunes partisans enthousiastes qui s’étaient joints à la colonne de Kinganga ont également été passés par les armes. Le capitaine Augustin Poignet, lui aussi impliqué parvient à se sauver vers Kinshasa. Une semaine plus tard, 3 complices (Miawouama, Nkoutou et Mengo), condamnés par une cour martiale, sont exécutés. Des membres du commando et des complices dans l’armée et la gendarmerie sont condamnés par la cour révolutionnaire. Après les événements, Marien Ngouabi, dénonce l’implication de la CIA et du président Mobutu Sese Seko du Congo-démocratique voisin dans le putsch.
Suite à cette tentative, le PCT se réunit en congrès extraordinaire du 30 mars au 2 avril 1970. Le Bureau politique est élargi à 10 membres, au profit d’Ambroise Noumazalaye et du capitaine Sassou N’Guesso. La Gendarmerie dont la loyauté n’a pas été totale durant les événements est dissoute et ses membres incorporés dans l’armée. Le Conseil d’État est remanié.
Le 29 août 1970, l’ancien ministre Stephane-Maurice Bongo-Nouarra est arrêté pour complot contre-révolutionnaire. Il est condamné à 10 ans de travaux forcés.
Au cours de cette année 1970, des comités révolutionnaires sont créés dans toutes les entreprises et administrations et une attestation de militantisme devient nécessaire pour postuler à une fonction dans l’administration publique.
Le 4 décembre 1971, Marien Ngouabi crée par ordonnance l’Université de Brazzaville. Elle intègre tous les établissements d’enseignement supérieur qui existaient à Brazzaville.
La tentative du M22 (Décembre 1971 – mai 1973) [modifier]
Quelques mois seulement après la création du PCT, l’aile gauche du parti commence à contester le leadership de Ngouabi, lui reprochant son apathie face à la recrudescence de la corruption et une gestion ethnique du pouvoir. En mars 1971, Martin Mberi fait distribuer des tracts dénonçant le tribalisme de Ngouabi. En novembre 1971, les lycéens et étudiants entament une grève générale à Brazzaville et Pointe-Noire pour protester contre le manque de moyens dans l’enseignement et aussi contre l’engagement idéologique de façade et l’embourgeoisement de certains hauts dirigeants du parti. Ngouabi y voit une manipulation de l’aile gauche du parti. La répression des manifestations provoque la mort d’un lycéen à Pointe-Noire.
Du 27 au 31 décembre 1971, la session extraordinaire du Comité central du PCT, tourne à l’épreuve de force entre le clan de Ngouabi et l’aile gauche du parti (Noumazalaye, Ndalla, Diawara, Kimbouala-Nkaya, Combo-Matsiona, Bongou, etc). Des exclusions du Bureau politique ou du Comité central sont prononcées à l’issue de la réunion, touchant aussi bien la gauche (Ndalla, Combo-matsiona) que la droite du parti (Raoul). Le bureau politique est réduit à 5 membres. Le Conseil d’État est également remanié. Aloïse Moudileno Massengo remplace Alfred Raoul comme Vice-président.
Le 22 février 1972, alors que Ngouabi effectue un séjour de travail à Pointe-Noire, Diawara prend la tête d’une tentative de putsch. Les conjurés occupent la Radio nationale et l’aéroport de Brazzaville. Ils arrêtent plusieurs responsables politiques à Brazzaville. Le commandant Yhomby-Opango, Chef d’État-major, fait échec à l’entreprise. Du côté des putschistes, les ministres Prosper Matoumpa Mpolo et Elie Itsouhou, ainsi que Franklin Boukaka sont tués. Rentré précipitamment de Pointe-Noire dans la soirée, Ngouabi reprend la situation en main. Des dizaines de personnalités (Lissouba, Noumazalaye, Ndalla, Combo-Matsiona, Raoul, Bongou, Atondi-Momondjo), ainsi que des jeunes partisans de l’aile gauche du parti sont arrêtés. Diawara, Ikoko et quelques camarades parviennent à s’échapper et établissent un maquis aux environs de Goma Tse-tse, à une cinquantaine de kilomètres de Brazzaville.
Le jugement en cour martiale des auteurs du putsch a lieu au début du mois de mars. 23 condamnations à mort sont prononcées (Diawara, Noumazalaye, Ndalla, Bongou, Ikoko, Kimbouala-Nkaya, Ndebeka, Atondi-Momondjo, etc), ainsi que plusieurs peines d’emprisonnement. Passant outre l’opposition de son clan, Ngouabi commue la peine capitale en prison à vie, excepté pour les putschistes en fuite.
Une opposition clandestine s’organise sous le nom de Mouvement du 22 février (M22)dans le pays, relayant le maquis guevariste que Diawara a monté dans la forêt de Goma Tse-tse. Diawara rédige un document intitulé ‘’’Autocritique du M22’’’ qui circule sous le manteau dans les grandes villes. Il y dénonce la collusion de l’OBUMITRI (Oligarchie Bureaucratico-Militaro-Tribaliste, représentée par Ngouabi) avec l’impérialisme français. Il y analyse aussi les causes de l’échec de la tentative du M 22.
Fin juillet 1972, Ngouabi convoque une Conférence Nationale, chargée de réfléchir aux grandes orientations du pays. Le forum ne produit pas de résultats significatifs, mais lui permet tout de même de s’allier une grande partie des membres de l’Association des Étudiants Congolais (AEC), venus de France.
En août 1972, Moudileno Massengo, en visite en France, démissionne avec fracas de sa charge de vice-président du Conseil d’État, Ange-Edouard Poungui est désigné pour le remplacer.
A pertir de février 1973, l’armée entreprend des opérations militaires dans la région de Goma Tse-tsepour démanteler le maquis de Diawara. Au cours du même mois, Ngouabi dénonce une autre tentative de Diawara et fait arrêter 45 personnes, dont Pascal Lissouba et Sylvain Bemba, ministre de l’information. Leur procès a lieu du 16 au 23 mars. Des peines diverses sont prononcées, Lissouba étant acquitté.
L’entreprise du M22 se termine brutalement le 24 avril 1973 avec la capture et l’exécution des maquisards. Les cadavres de Diawara, Ikoko et Bakekolo sont promenés à travers Brazzaville et exhibés par Ngouabi en personne au cours d’un meeting populaire tenu au Stade de la Révolution. le manque d’égards pour les corps privés de vie des maqisards choque profondément l’opinion nationale qui est heurtée dans sa sensibilité bantoue.
Pour avoir surmonté les multiples tentatives contre son pouvoir, Ngouabi acquiert auprès des populations, surtout chez les jeunes, une aura de héros invincible. Cette perception est renforcée par l’outrecuidance avec laquelle il s’en prend verbalement à la France dans ses discours.
La mise en place de la quatrième république (juin 1973 – décembre 1974) [modifier]
Le 24 juin 1973, le peuple congolais est appelé à se prononcer sur une nouvelle constitution élaborée par le PCT, lors de son IIe Congrès extraordinaire de décembre 1972. 73.5% de votes favorables sont enregistrés. Le nouveau texte fondamental rétablit l’Assemblée nationale et institue des Conseils locaux. Le parlement sera composé de 115 députés élus au suffrage universel sur une liste unique présenté par le parti unique. Un exécutif à 2 étages est prévu avec un gouvernement dirigé par un Premier ministre et un Conseil d’État dirigé qui le chapeaute et qui est dirigé par le Chef de l’État et comprend 5 membres du Bureau politique et les 5 membres du Bureau de l’Assemblée nationale.
Le 27 août 1973, Henri Lopès est nommé Premier ministre. Il constitue un gouvernement de 17 membres. En octobre, le Haut commandement militaire est également remanié, le capitaine Victor Tsika Kabala remplaçant Yhombi-Opango à la tête de l’APN.
Au début de cette année 1973, l’État qui peinait à équilibrer son budget depuis 1968, a vu ses recettes augmenter considérablement avec la mise en production au large de Pointe-Noire du champ d’Émeraude, quelques mois plus tôt. Avec l’exploitation de ce gisement géant sous concession par la société Elf-Congo, le Congo fait son entrée véritable dans le cercle des pays africains producteurs de pétrole, au meilleur moment (choc pétrolier de 1973). D’insignifiante, la part des revenus pétroliers dans le budget passe à 31%.
En janvier 1974, la société ELF consent à verser 21 milliards de francs CFA à l’État congolais en règlement d’un contentieux sur les redevances antérieures. En ce début d’année 1974, de nouveaux accords de coopération sont signées entre le Congo et la France.
En février 1974, la société Hydro-Congo est créée. La nouvelle entreprise d’État ambitionne de se lancer à terme dans la prospection et la production pétrolière, à l’exemple de la Sonatrach. Dans un premier temps, elle se contente d’assurer la distribution des produits pétroliers. Elle en obtient le monopole et les stations-service sont toutes nationalisées.
Dans le courant de l’année 1974, les localités du Congo sont débaptisées. Les noms français hérités de la colonisation sont remplacés par les dénominations antérieures. Dans certains cas, on n’en crée de nouveaux. Cependant le nom de Brazzaville est inchangé. La dénomination des établissements scolaires est également modifiée.
En décembre 1974 se tient le IIe congrès ordinaire du PCT. Ngouabi est reconduit à l’unanimité à la tête du parti unique et de l’État pour 5 ans.
Sur le plan international, le régime de Ngouabi apporte son soutien aux mouvements progressistes de libération dans les colonies portugaises d’Afrique. Particulièrement en Angola, le MPLA d’Agostinho Neto trouve du côté de Brazzaville une base arrière dans son conflit contre le Portugal, puis contre les mouvements rivaux de l’UNITA et du FNLA.
Le temps des désillusions (janvier 1975 – mars 1977) [modifier]
Le système mis en place par Marien Ngouabi montre de plus en plus ses limites. L’édification d’une société socialiste au cœur de l’Afrique ne se révèle pas une franche réussite. Au Congo où chacun a une conscience exacerbée de son identité ethnique, Ngouabi bénéficie du soutien appuyé des populations et des élites du Nord du pays, dont il est originaire, et doit composer avec l’hostilité plus ou moins larvée d’une bonne partie des populations et des cadres originaires du Sud. Dans ce contexte, le PCT apparaît à beaucoup comme un instrument de domination de l’élite nordiste. Les règles de fonctionnement du parti favorisent d’ailleurs cette perception. L’adhésion au PCT est assujettie au parrainage d’un membre du Comité central. Par calcul politique, les dirigeants favorisent généralement l’incorporation de citoyens qui, par affinité ethnique ou autre, leur sont proches, afin de se constituer une clientèle. Le niveau intellectuel et moral du PCT s’en ressent. De plus en plus, l’adhésion au PCT n’est plus qu’une affaire d’opportunisme, car le parti unique est devenu la voie obligée pour progresser. De la théorie marxiste les militants n’ont souvent qu’une idée vague ou confuse. L’élimination du M22 (exclusion, emprisonnement ou exécution) a privé le PCT de ses membres les plus sincères et les plus acquis à l’idéologie communiste. Le comportement des dirigeants du parti et donc de l’État ne cadre pas toujours avec l’orthodoxie marxiste-lenniste (arrogance, enrichissement) et des présomptions de détournement pèsent sur plusieurs d’entre eux dans l’opinion.
L’organisation de la société suivant les dogmes du socialisme scientifique a eu des conséquences désastreuses sur le fonctionnement de l’État. Les administrations publiques et les services sociaux ont grandement pâti de la préférence partisane qui a promu les membres du PCT à la tête de toutes les structures publiques, sans considération des compétences. Les détournements de fonds deviennent courants dans les services et entreprises publics et sont, dans la plupart des cas, le fait de cadres du PCT.
Le principe de la trilogie déterminante qui associe le Parti, le Syndicat et le Gouvernement dans la gestion, a considérablement nui au rendement des entreprises d’État. Par système, l’accession aux responsabilités dans le monde de l’entreprise a été déterminée par le militantisme plutôt que par la capacité. Il en a résulté une baisse de la productivité.
Confiant dans les prévisions de recettes de l’exploitation pétrolière, Ngouabi a lancé le programme triennal 1975-77 de développement économique, social et culturel, en janvier 1975. Le plan, d’un coût de 75 milliards de francs CFA a pour objectifs l’édification d’une économie indépendante, le désenclavement de l’arrière-pays et la réduction des inégalités sociales. La relance des entreprises publiques défaillantes, la création de nouvelles entreprises d’état (Plasco, Impreco, etc) et de nombreux travaux publics (construction d’un nouveau tronçon du CFCO entre Dolisie et Bilinga, de plusieurs centaines de kilomètres de route et d’aéroports dans quelques centres urbains du pays) sont inscrits dans le programme triennal.
Malheureusement, les difficultés économiques, estompées pendant quelques temps par les revenus du pétrole ressurgissent. Le gisement d’Émeraude n’a pas la productivité escomptée et décline plus vite que prévu. L’impéritie des offices étatiques de commercialisation provoque la baisse de la production du cacao et du café. Les fermes d’État, conçues sur le mode des kolkhozes soviétiques sont improductives. Les usines sont au bord de la faillite. L’entrée en production de la raffinerie de Pointe-Noire, prévue en 1975, a pris du retard. Les travaux entamés en 1972 avec l’objectif d’une indépendance en matière d’approvisionnement en produits hydrocarbures et d’un allègement de la facture énergétique, ne sont pas achevés. Malheureusement pour le président Ngouabi, les slogans patriotiques et les diatribes quotidiennes contre l’impérialiste sont insuffisants contre le marasme économique ou les difficultés budgétaires. La classe politique ne croit plus en sa capacité à redresser le pays et l’opinion est perplexe.
Pour relancer la machine, Ngouabi réunit le Comité central en session extraordinaire du 5 au 12 décembre 1975. La direction du PCT fait le constat du « manque de cohésion et dynamisme de la direction politique », du « manque de combativité des organisations de masse » et des mauvaises performances des entreprises d’État, dues à l’incompétence et l’inconscience des cadres, à la pléthore des effectifs et à la course effrénée aux avantages matériels. Une « radicalisation de la révolution » est entreprise pour « éviter sa récupération par les forces réactionnaires de l’intérieur et de l’extérieur ». Concretement, certains membres du Comité central sont exclus (Yhombi-Opango, Martin Mberi, Pierre Nze, Anatole Kondho, Jean-Jules Okabando) et le Bureau politique est dissous. Un État Major Spécial Révolutionnaire est institué à la place. Un nouveau gouvernement est formé. Pour les entreprises publiques, le Comité central recommande un « inventaire systématique de tous les cadres de la Nation afin de mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut ».
L’État Major Spécial Révolutionnaire est composé de Marien Ngouabi, Jean-Pierre Thystère-Tchicaya, Louis-Sylvain-Goma, Denis Sassou N’Guesso et Jean-Pierre Gombe. Sylvain-Goma nommé Premier ministre le 18 décembre, compose un gouvernement de 15 ministres. Le 28 décembre, Sassou N’Guesso est nommé Délégué du Conseil d’État chargé de la Défense et de la Sécurité, par décret présidentiel. Courant Janvier 1976, Ngouabi promulgue un Acte fondamental qui transfère les pouvoirs du Comité Central à l’État Major Spécial Révolutionnaire.
Le 19 mars 1976, quelques semaines seulement après ces changements, l’hélicoptère du Président s’écrase dans la forêt du Nord, avec à son bord, outre Ngouabi lui-meme, le commandant Kakou, le Professeur Diamond, et l’homme d’affaires Nicoloso. Durant 5 jours, la Nation est sans nouvelle de Ngouabi et de ses compagnons. Les épurés, c’est-à-dire les victimes de la radicalisation, tentent de reprendre la main. La CSC, Syndicat unique affilié au PCT, appuyé par une partie de l’UJSC, déclenche une grève générale de l’ensemble des travailleurs pour réclamer la réhabilitation du Comité Central. Thystère-Tchicaya, numéro deux du régime, parvient à faire échec au mouvement. Pendant ce temps, après avoir traversé la forêt à pied plusieurs jours durant, Ngouabi atteint enfin Owando. Il est le seul survivant du crash avec Kakou. De retour à Brazzaville, il fait le ménage à la tête de la CSC, où Jean-Michel Bokamba-Yangouma remplace Anatole Kondho, et à l’UJSC où Jean-Pierre Gombe prend la place de Jean-Jules Okabando.
En novembre 1976 se tient une conférence du parti pour analyser le processus historique de la révolution et ses perspectives. Les préparatifs du troisième Congrès extraordinaire du PCT y sont entamés.
Les nouvelles ne sont pas réjouissantes en cette fin d’année 1976. Les mines de potasse de Holle s’ennoient. Accident ou sabotage ? Pour Ngouabi, le doute n’est pas permis, il s’agit d’un sabotage délibéré de l’impérialisme français. Les potasses d’Alsace qui les exploitent, voulaient les fermer depuis plusieurs années parce quelles les jugent non rentables. Par ailleurs, les incursions des indépendantistes cabindais du FLEC sur le territoire congolais pour saboter la voie de réalignement du CFCO en construction, alourdissent le climat politique.
La fin tragique (18 mars 1977) [modifier]
Article détaillé : Assassinat de Marien Ngouabi.
Début mars 1977, Ngouabi reçoit une lettre de son prédécesseur Massamba-Debat. Dans sa missive, celui-ci lui recommande de démissionner, car la gravité de la situation du pays l’impose. Le 3 mars, il reçoit en audience l’ancien président et son épouse. Quelques jours plus tard, lors d’un meeting populaire organisé par l’URFC, il s’en prend violemment à l’impérialisme français qu’il tient pour responsable des difficultés économiques du Congo. Il y prononce également cette phrase curieuse : « Lorsque ton pays est sale et manque de paix durable, tu ne peux lui rendre sa propreté et son unité qu’en le lavant avec ton sang».
Le 18 mars, il commence sa journée par la Faculté des Sciences de l’Université de Brazzaville, où il est chargé de cours en première année. De retour à l’État Major, il reçoit successivement en audience Alphonse Mouissou-Poaty, le Président de l’Assemblée nationale et le cardinal Emile Biayenda. A 14h30, une fusillade éclate dans l’enceinte de sa résidence. Quelques minutes plus tard, il est conduit en urgence à l’hôpital militaire de Brazzaville. Les médecins constatent immédiatement son décès par homicide.
La postérité [modifier]

Dès la mort de Ngouabi, un Comité Militaire du Parti est institué. Le 19 mars, la nouvelle junte désigne le capitaine Barthélemy Kikadidi comme le chef du commando qui a assassiné Ngouabi. Le CMP monte une commission d’enquête et une cour martiale qui condamne à mort Massamba-Debat et plusieurs membres de la garde présidentielle. L’ancien président est exécutée une semaine après la mort de son successeur.
Les obsèques de Ngouabi ont lieu le 2 avril. Le commandant Sassou N’Guesso lit l’oraison funèbre. Le président défunt est inhumé dans l’enceinte même de l’État Major, devant sa résidence. Quelques mois plus tard, un mausolée est érigé sur sa tombe.
Ses successeurs, Yhombi-Opango puis Sassou N’Guesso, instituent un culte national à sa mémoire et son œuvre, à l’image de celui de Lénine en URSS ou de Mao en Chine. Ils proclament tenir leur légitimité de lui et s’inscrire dans la continuité de son action. L’Université de Brazzaville est rebaptisée à sa mémoire.
En janvier 1978, la cour révolutionnaire ouvre le procès de 42 personnes accusées de complicité dans son assassinat. 10 d’entre elles sont condamnées à mort et exécutés le 7 février. Le capitaine Barthelemy Kikadidi, en fuite depuis le 18 mars 1977, et condamné à mort par contumace pour avoir dirigé le commando ayant attenté à la vie de Ngouabi, est abattu par l’armée le 13 février 1978.
En 1991, la Conférence nationale Souveraine relativise la place de Ngouabi dans l’historiographie congolaise et réhabilite les autres anciens présidents du Congo (Fulbert Youlou, Alphonse Massamba-Debat et Joachim Yhombi Opango).
A une date non déterminée, la dépouille de Ngouabi a été exhumée en toute discretion pour être re-inhumée à Owando.
Citations [modifier]

« Lorsque ton pays est sale et manque de paix durable, tu ne peux lui rendre sa propreté et son unité qu’en le lavant avec ton sang » Marien Ngouabi, 13 mars 1977 : dernier discours à la place de l’hôtel de ville de Brazzaville.
« L’unité nationale, la seule vraie, c’est la conjugaison des efforts de tout le peuple, à travers les 9 régions du pays, sur la base du travail en vue de l’augmentation de la production nationale. Et la paix sociale ne peut se maintenir que dans un contexte général de travail ». Marien Ngouabi, 31 décembre 1976.
« Il n’est pas possible d’obliger les masses à accepter tel ou tel cadre, comme le représentant valable de l’avant-garde prolétarienne. Le respect des masses se gagne. Aucun prestige ne vient du ciel. C’est notre pratique qui nous le confère ou, au contraire, nous le refuse. Les masses veulent retrouver chez leurs dirigeants, sinon l’image de ce qu’elles sont actuellement, du moins celle de ce qu’elles désirent devenir pour que la société soit meilleure. L’autorité du Parti sera toujours contestée tant que ses cadres n’auront pas ce rayonnement qui crée des disciples et les militants à toute épreuve » Marien Ngouabi, décembre 1974

« Du haut de la résidence présidentielle, assis sur l’une des terrasses principales qui offrent une vue merveilleuse sur le fleuve Congo, je me suis senti profondément touché par un spectacle pourtant régulier et monotone propre à l’Afrique noire, à toute l’Afrique tout simplement. Ce spectacle me bouleverse parce que, en tant que responsable politique et cadre de ce pays, le Congo, je me trouve directement concerné par ce que j’observe. Je ne suis pas dans l’arrière-pays, je me trouve à Brazzaville, capitale de la République Populaire du Congo. Je suis dans une ville des plus agitées de l’Afrique, une ville où très tôt, dès 1963, les masses populaires ont osé braver les canons de l’impérialisme pour décider elles-mêmes de leur propre histoire, l’histoire de leur pays. Je suis à Brazzaville où, depuis bientôt huit ans, le socialisme scientifique n’est plus un vain mot, une doctrine inconnue de notre peuple, et mieux de notre jeunesse intellectuelle dynamique et révolutionnaire. Mais ce spectacle me hante tellement aujourd’hui que je suis obligé de commencer d’écrire précocement l’expérience de notre Révolution, ce qu’a été notre Révolution, et ce que pourra et doit être notre Révolution. En face de moi, pendant que j’écris, il y a des femmes, des femmes paysannes qui sont là, depuis des heures, au bord du fleuve Congo, coupe-coupe et houe à la main, fatiguées mais laborieuses. Des femmes qui travaillent pour se nourrir, pour s’habiller, pour vivre, pour faire l’histoire du Congo, l’histoire d’une étape de notre Révolution, l’histoire d’une Afrique exploitée. Elles sont là dès les premières heures de la journée, avec tous leurs enfants et même leurs tout petits enfants. Elles transforment la nature, elles créent, elles travaillent pour la production. Il y a aussi quelques hommes affairés pour la même besogne et tous ici, dans notre capitale, font bien partie de la paysannerie pauvre qui est la couche la plus importante de notre société. Je me suis rendu compte qu’il y a une grande différence entre ce que je veux et ce que j’obtiens, entre ce que je dis et ce qui se fait réellement ou concrètement. Je me suis rendu compte et je me rends de plus en plus compte qu’il risque d’exister un vide entre les directives et l’exécution, entre la théorie et la pratique »
Marien Ngouabi, Samedi 19 juin 1971 (16h16)

Message retranscris à partir de la publication du site Brazza.tv